Les restrictions et interdits alimentaires sont-ils le casse-tête des insuffisants rénaux dialysés ?

Affirmer que les interdits et les restrictions alimentaires représentent le casse-tête des dialysés paraît ringard et paradoxal. Cela est d’autant plus vrai que les restrictions et interdits alimentaires mettent les dialysés à l’abri des conséquences fâcheuses d’une alimentation inadaptée à leur pathologie. Force est de constater que c’est aussi « grâce » aux restrictions et interdits alimentaires que certains dialysés, notamment en Afrique, s’éteignent petit à petit, mais sûrement. Pourquoi ? Hippocrate, considéré comme le père de la médecine, prévenait déjà les malades en ces termes, je cite en substance : « ton aliment (alimentation) sera ton premier médicament ».

Comment imaginer le dialysé, privé, pour des raisons d’ailleurs objectives, de certains aliments indispen sables à son équilibre de bilan, à sa vie, tout simplement ? De ce point de vue, les restrictions et interdits alimentaires ne sont pas que le casse-tête des dialysés ; ils sont aussi le casse-c…. Pardonnez-moi, ils aident à casser la pipe à des patients fragilisés par leur pathologie et les contraintes de leur traitement. En effet, le régime alimentaire basé sur de stricts interdits et restrictions dérange. Surtout, il « dérange la tête des dialysés », autrement dit, il favorise la déprime et brise l’équilibre moral et mental du patient. Dans ces conditions, le dialysé, anorexique, sombre davantage dans un régime d’inanition, de privation de nourriture. Il se prive des aliments qui lui apporteraient les éléments essentiels à sa survie.

Il n’est pas étonnant qu’en Afrique, la durée de vie d’un dialysé soit abrégée. Les interdits et les restrictions y sont pour quelque chose, à mon sens. Le cas n’est pas, heureusement (ou malheureusement) particulier aux africains. Des cas de figure identiques se rencontrent également dans les pays nantis, dotés de structures adéquates et de spécialistes aguerris. Quelques anecdotes pour illustrer ces propos :

Aujourd’hui, je me suis entretenu, séparément, avec deux dialysés, originaires d’Afrique, résidant en France. Il s’agit de K…. un jeune homme, la quarantaine bien sonnée ; et de Mme C…. Cette dernière rapporte que dans son pays, le dialysé vit en moyenne deux à trois mois après l’instauration du traitement par hémodialyse. Elle ajoute " quand je dis aux parents et amis restés en Afrique que j’ai accouché d’un enfant étant dialysée, ils ne me croient pas. C’est impensable pour eux. C’est irréaliste ! "

C’est la preuve d’une meilleure prise en charge par des professionnels aguerris dont j’ai parlé plus haut. Par contre, le jeune homme s’est étendu en complaintes, pour le moins, pathétiques et risibles en même temps. J’ai ri à en pleurer. Monsieur K… dit avoir chez lui la liste des aliments interdits par son médecin. « Je mange les pommes de terre une fois par semaine; de même, la salade, la banane. Pas de pâtes, pas de viande ; mais du poisson à volonté, parce que dit-il, le médecin a dit que le poisson se digère mieux. Et monsieur K… d’ajouter : « Un jour j’étais invité par un ami. Il a préparé un bon steak. Je lui ai dit que je n’en mangeais pas. J’ai envie de manger une pomme, par exemple, mais j’ai peur. Alors, je ne mange pas de pommes et autres fruits. Pour me faire plaisir, je grignote un tout petit quartier. Même le yaourt, je n’en mange pas. Quant aux tomates, je ne les achète même pas ; je ne les regarde pas. Souvent, je regarde des aliments ; j’ai envie d’en manger ; mais je ne peux pas, à cause des interdits. Les aliments en conserves sont également exclus de mon régime. C’est mon médecin qui m’a dissuadé de les consommer. Etc. etc…. »

Au final, que reste-t-il à manger à ce monsieur, dialysé depuis un an et demi ? Pas de viande, pas de pâtes, pas de légumes, pas de fruits, pas de produits laitiers. Donc, apport insuffisant de glucides (sucres), de protéines, de sels minéraux, de vitamines. Rien. Rien du tout. C'est dire que l'organisme fonctionne en dessous de ses besoins. A quoi cela ressemble-t-il si ce n’est une fin de vie douloureuse programmée inconsciemment ? A quoi ce patient ressemble-t-il si ce n’est à un sujet enclin à la déprime, à la dénutrition et aux maladies intercurrentes ? Convenons-en: là n’est pas le but du traitement par hémodialyse. Il n’est pas non plus recommandable de laisser le dialysé se relâcher sur son régime alimentaire. Certes, le médecin qui fournit ces informations reste préoccupé par l’état de santé et le confort sanitaire de son patient. Il ne peut pas dire aux dialysés de manger tout ce qui leur plaît. Beaucoup de patients en abuseraient, par ignorance. Sans s’en rendre compte.

Peut-être. Le médecin n’a pas le temps, non plus, d’expliquer individuellement à chaque patient les quantités d’aliments restreints ou interdits que ce dernier pourrait manger. Ce rôle revient au nutritionniste à qui le médecin peut adresser son patient. Ce qui est inacceptable, c’est de brandir systématiquement l’épouvantail de potassium, phosphore, liquide et autres sans autres explications. Faute de telles explications, le patient se met à un régime d’inanition, de privation totale. C’est probablement le cas de monsieur K….

Monsieur le Professeur Thierry Petitclerc, directeur actuel de l’AURA, évoquant dans un article le sodium et les restrictions hydriques, s’indignait des prescriptions de privation ou de restrictions drastiques faites aux patients. Il les trouve « inhumaines » (sic), en l'état actuel des connaissances scientifiques.

Le dialysé peut se faire plaisir en consommant raisonnablement certains aliments incompatibles avec sa pathologie. Il a besoin, pour cela d’un accompagnement. Il a besoin de savoir la teneur en potassium, phosphore, eau et autres des aliments, pour mieux gérer son régime, en évitant des privations rigoureuses. Le présent site a pour ambition de remplir ce devoir. C’est un engagement d’aider les insuffisants rénaux dialysés et transplantés.

Alors, à vos marques. Prêts ? Surfez !